Société

ÉDITO : Funeste direction

Comme chaque année, aux quatre coins du monde, le mois d’octobre est consacré à la prévention autour de la santé mentale. Partout, les organisations de santé, associations, et personnalités publiques se démènent pour parler de l’importance de la santé mentale, au même titre que la santé physique. Plus que jamais, l’objectif est de prendre soin les uns des autres, pour éviter l’isolement, le mal-être, ou pire, les drames.

Alors quand en plein mois d’octobre, l’une des têtes d’affiche du plus gros boys band des années 2010 met fin à ses jours, en sautant du balcon de sa chambre d’hôtel, la bataille a une toute autre saveur. Des signaux de détresse non détectés, une addiction à l’alcool et aux drogues non soignée, un cyberharcèlement à son apogée : une accumulation d’éléments, au goût particulièrement amer pour ceux qui se démènent jour et nuit pour faire face à ces fléaux. Quand un trentenaire, un père, décide qu’il ne veut plus vivre, c’est tout un système qui souffre. Ses proches, ses amis, sa famille, ceux qui n’ont pas pu l’aider à temps.

C’est un échec de plus pour tous les professionnels de santé mentale. Un crève coeur pour toutes les personnes qui l’admiraient, et qui pleurent sa disparition sur les réseaux sociaux. Mais qu’en est-il quand ce même homme, torturé, est aussi l’homme accusé de violence par son ex-compagne ? Ex-femme qu’il aurait poursuivit « autour de la maison avec une hache ». Qu’il aurait « forcé à avorter ». Qu’il aurait « harcelé au téléphone pendant des mois, passant par des amis, des parents, pour tenter de la joindre ».

Qu’en est-il de cet homme là, si tant est qu’il existe ?

Loin de là l’idée de relancer le débat de la séparation de l’artiste et de son oeuvre. Mais quand le présumé coupable est aussi la victime, il est difficile de se positionner. Faut-il se positionner d’ailleurs ? Son statut de potentiel agresseur doit-il rendre sa disparition moins douloureuse ? Moins grave ? En est-on arrivés à considérer qu’une vie vaut moins qu’une autre ?

Douter est normal. Personne ne veut être du mauvais côté de l’histoire. La cancel culture est omniprésente dans notre société, nombreuses sont les personnes qui la redoute. Le deuil est un processus terriblement compliqué, et encore plus quand il concerne le souvenir que l’on a d’une personne ou l’image qu’elle renvoyait, et non à la personne en elle même. Était-il une mauvaise personne ? Peut-être. Méritait-il de mourir de cette façon ?

Certainement pas. Le deuil que traversent des millions de personnes actuellement n’est pas le deuil de l’homme potentiellement violent dépeint par son ancienne amante. C’est le deuil de leur enfance, bercée par un groupe de chanteurs, qui plus jamais ne reviendra comme avant. C’est le deuil d’une époque. Le seule polémique qui devrait subsister aujourd’hui, c’est autour de l’état des systèmes de protection de la personne, en France, et partout dans le monde, qui ne permettent pas d’accompagner suffisamment les personnes en détresse, quelles qu’elles soient, et quelle qu’en soit la nature. Tout autre débat doit être proscrit.

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